Adopté le 20 juillet par l’Assemblée nationale d’une part et par le Sénat d’autre part, le projet de Loi de lutte contre le dérèglement climatique aurait pu être publié dans les 15 jours suivant cette adoption, permettant à de nombreuses dispositions d’entrée en vigueur. C’était sans compter sur le recours déposé devant le conseil constitutionnel par un groupe d’une soixantaine de Députés socialistes/EELV/LFI.  

Mais pourquoi ce recours ?  

Les requérants expriment plusieurs motifs pour légitimer leur initiative. Ils estiment tout d’abord que le projet de Loi prive de garanties légales « le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » tel que le mentionne l’article 1er de la Charte de l’environnement. 

Se référant à l’avis remis par le Haut Conseil pour le Climat (HCC), les Députés rappellent que le texte, peu modifié in fine suite à son passage au parlement, ne permettra pas de rattraper le retard que la France a accumulé dans la transition bas carbone et que plus largement, la stratégie de décarbonation de notre pays n’y transpire pas clairement. 

Comparé à ‘une spirale d’inactions’ alors même que le Conseil d’Etat a enjoint la France a accéléré son action de lutte contre le dérèglement climatique et que la commission européenne a réhaussé son objectif de réduction des gaz à effet de serre à -55%, ce projet de Loi apparaît pour ses détracteurs comme n’étant pas à la hauteur des enjeux. Le texte serait par ailleurs trop faible dans ses mesures d’accompagnement des ménages et des acteurs économiques et ne consacrerait pas à la recherche les moyens nécessaires.  

Citant le HCC à de nombreuses reprises, l’argument de l’urgence climatique versus le temps long est posé. Les mesures concernant la rénovation énergétique sont plus particulièrement ciblées, les auteurs estimant que les échéances retenues sur l’interdiction de location par exemple sont trop tardives au regard des mesures de neutralité carbone du parc attendu d’ici 2050. Audits pour les seuls biens mis à la vente, pas d’obligation pour l’acquéreur de réaliser des travaux, logements de classe D ciblés uniquement en 2034, expérimentation de nombreuses mesures sans généralisation avant 2023…la question est posée du rythme d’actions pour endiguer le changement climatique. 

Ce rythme est notamment repris en exemple pour ce qui concerne les rénovations énergétiques, chiffres de l’Anah à l’appui. Mais au-delà du nombre de rénovations, les Députés s’interrogent également sur la qualité des rénovations, craignant que les « gestes éparses » ne soient contraires à la logique de rénovation performante. C’est cette fois l’Ademe qui sert de référence via la dernière étude TREMI menée en en 2016. Ce qu’il faudrait faire ? A priori mettre en place une trajectoire de monter en puissance des rénovations avec des moyens techniques et financiers appropriés. 

« L’absence de soutien et de perspectives stratégiques pour la recherche et le développement en matière environnementale risque fortement de compromettre la capacité des générations futures à vivre dans un environnement sain » mentionne par ailleurs la saisine pour revenir sur la Charte de l’environnement et rappeler qu’en son article 2, toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. Or l’Etat est une personne, morale certes, mais une personne tout de même nous rappellent les Députés porteurs du recours. 

C’est enfin le principe d’égalité devant la Loi que les requérants souhaitent rappeler, jugeant que les entrepôts de commerce en ligne devraient, au même titre que les autres entrepôts, être soumis aux mêmes contraintes concernant la limitation de l’artificialisation des sols, ne pouvant mettre en avant un quelconque motif d’intérêt général. 

Sur la base de ces motifs, les Députés demandent au Conseil constitutionnel d’invalider les modalités entachées d’inconstitutionnalité et au Législateur de prendre les mesures adéquates dans les 8 mois à venir.  

Affaire à suivre… !